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  • Un vibrant appel au dialogue social - Tous Frères!

    Un vibrant appel au dialogue social
    Tous Frères!

    En lien avec une tradition plus que centenaire de l’Eglise catholique, le Pape François vient
    de publier, sous la forme d’une lettre encyclique, un « appel au dialogue avec toutes les
    personnes de bonne volonté »(6)*. En un peu moins de trois cents paragraphes, répartis en
    huit chapitres, le Pape nous confie que les questions liées à la fraternité et à l’amitié sociale
    ont toujours été parmi ses préoccupations(5). C’est pourquoi il fait une large place à
    l’entretien qu’il a eu, dans un passe récent, avec le Grand Imam d’ Abou Dhabi. Le
    message est clair et direct : c’est celui de la collaboration de tous les hommes de
    bonne volonté pour l’avènement de la fraternité universelle, par-delà les
    différences de croyance-ou d’absence de croyance-religieuse. Le Pape a de la suite
    dans ses idées : Laudato si, son encyclique sur l’écologie, avait été adressée au
    Patriarche Orthodoxe.

    Un coup d’œil aux titres des huit chapitres que contient la nouvelle encyclique nous
    aidera à suivre la démarche du Pape :
    -Les ombres d’un monde fermé,
    -Un étranger sur le chemin,
    -Penser et gérer un monde ouvert
    -Un cœur ouvert au monde
    -La meilleure politique
    -Dialogue et amitié sociale
    -Des parcours pour se retrouver, et
    -Religions au service de la fraternité
    La démarche consiste à constater combien les hommes et les femmes de ce début
    du vingt et unième siècle sont tellement préoccupés à promouvoir et à protéger
    leurs intérêts personnels qu’ils agissent de manière égoïste et qu’ils vivent dans un
    monde renfermé. Il est précisé que les intérêts personnels comprennent aussi les
    affinités de clans, de classes, d’ethnies, et ainsi de suite. Tout au long de la Lettre,
    défilent les exemples de ces fermetures à autrui, accompagnées de propositions de
    changement d’attitudes, afin que fleurisse la fraternité à travers l’humanité tout
    entière. L’article que voici suivra la même démarche : seront d’abord évoqués les
    exemples de fermeture aux autres, avant que ne soient proposées les propositions
    d’ouverture pour que soit établi le règne de la fraternité entre tous les humains. **
    Nationalismes étriqués et modèle culturel unique

    Bien au courant, de par ses origines, des problèmes en Amérique du Sud, le Pape
    regrette l’existence de nationalismes étriqués dans ce continent. Il en est de même
    dans la vieille Europe, où il constate et déplore la présence de ce phénomène. Par
    contre, il rappelle que ces nationalismes font bon ménage avec un type d’ouverture
    au monde qui ne favorise que les intérêts économiques. Il en résulte un modèle
    culturel unique, qu’il dénonce comme une colonisation culturelle :
    C’est dans ce sens qu’allait un conseil que j’ai donné aux jeunes : « Si quelqu’un
    vous fait une proposition et vous dit d’ignorer l’histoire, de ne pas reconnaître
    l’expérience des aînés, de mépriser le passé et de regarder seulement vers l’avenir
    qu’il vous propose, n’est-ce pas une manière facile de vous piéger avec sa
    proposition afin que vous fassiez seulement ce qu’il vous dit ? Cette personne vous
    veut vides, déracinés, méfiants de tout, pour que vous ne fassiez confiance qu’à ses
    promesses et que vous vous soumettiez à ses projets. C’est ainsi que fonctionnent
    les idéologies de toutes les couleurs qui détruisent (ou déconstruisent) tout ce qui
    est différent et qui, de cette manière, peuvent régner sans opposition. Pour cela
    elles ont besoin de jeunes qui méprisent l’histoire, qui rejettent la richesse spirituelle
    et humaine qui a été transmise au cours des générations, qui ignorent tout ce qui les
    a précédés ». (12)
    Dans le même souffle, le Pape déplore le recours à la consommation sans
    limites, et à la course vers le « revenu rapide » de la part des agents
    économiques. On peut penser, ici, à la course effrénée vers un retour rapide sur
    investissements, ou encore aux adeptes du tout, tout de suite. Puis, il change de
    registre et aborde le terrain politique :
    Que signifient aujourd’hui des termes comme démocratie, liberté, justice,
    unité ? Ils ont été dénaturés et déformés pour être utilisés comme des instruments
    de domination, comme des titres privés de contenu pouvant servir à justifier
    n’importe quelle action. (14) Voilà qui doit donner de quoi à réfléchir aux citoyens-
    électeurs que nous sommes tous, lorsque nous nous rendons aux urnes, mais aussi
    durant l’exercice de leurs mandats par ceux que nous avons élus.
    Poursuivons les constatations, relativement aux plaies de ce monde fermé.
    -le gaspillage est dénoncé. Il s’agit du gaspillage alimentaire, alors que des
    populations entières meurent de faim. Mais le Pape va plus loin dans ses
    dénonciations : il y a aussi un « gaspillage « des humains, notamment  ces
    « personnes qui ne sont plus perçues comme une valeur fondamentale à respecter
    et à protéger, surtout celles qui sont pauvres ou avec un handicap, si elles “ne
    servent pas encore” – comme les enfants à naître –, ou “ne servent plus” – comme
    les personnes âgées »(18).
    -le Pape se met alors à déplorer la «  baisse de la natalité, qui provoque le
    vieillissement des populations, associée à l’abandon des personnes âgées à une
    solitude douloureuse, »(19). Il s’appesantit sur « ce qui est arrivé aux personnes
    âgées dans certaines parties du monde à cause du coronavirus. Elles ne devaient

    pas mourir de cette manière. Mais en réalité, quelque chose de similaire s’était déjà
    produit à cause des vagues de chaleur et dans d’autres circonstances : elles ont été
    cruellement marginalisées. Nous ne nous rendons pas compte qu’isoler les
    personnes âgées, tout comme les abandonner à la charge des autres sans un
    accompagnement adéquat et proche de la part de la famille, mutile et appauvrit la
    famille elle-même. En outre, cela finit par priver les jeunes de ce contact nécessaire
    avec leurs racines et avec une sagesse que la jeunesse laissée à elle seule ne peut
    atteindre. (19)
    - les manifestations du racisme sont dénoncées, particulièrement dans le monde
    du travail. Si le Pape connaissait la situation mauricienne, il aurait, certes, pu ajouter
    des synonymes du mot : racisme à sa liste de dénonciations par rapport à
    l’embauche.
    -il va sans dire que le Pape plaide pour le travail pour tous ceux qui en ont besoin et
    il regrette une attitude qui consiste à réduire le cout du travail sans prendre en
    considération les conséquences pour ceux qui se trouvent réduits au chômage.
    -les inégalités sont ensuite déplorées, car même lorsqu’il y a eu croissance
    économique, « de nouvelles pauvretés apparaissent »:
    Lorsqu’on affirme que le monde moderne a réduit la pauvreté, on le fait en la
    mesurant avec des critères d’autres temps qui ne sont pas comparables avec la
    réalité actuelle. En effet, par exemple, ne pas avoir accès à l'énergie électrique
    n’était pas autrefois considéré comme un signe de pauvreté ni comme un motif
    d’anxiété. La pauvreté est toujours analysée et comprise dans le contexte des
    possibilités réelles d’un moment historique concret. (21)
    Si la réflexion du Pape s’était tournée vers Maurice, il aurait pris comme exemple les
    difficultés d’accès à l’eau potable et aux logements sociaux.
    -au titre des inégalités, le Pape souligne aussi le sort des femmes : l’organisation
    des sociétés dans le monde entier est loin de refléter clairement le fait que les
    femmes ont exactement la même dignité et les mêmes droits que les hommes. On
    affirme une chose par la parole, mais les décisions et la réalité livrent à cor et à cri
    un autre message. (23)

    -l’esclavage moderne est aussi décrié : des millions de personnes – enfants,
    hommes et femmes de tout âge – sont privées de liberté et contraintes à vivre dans
    des conditions assimilables à celles de l’esclavage. (24)
    Globalement, la réflexion du Pape le mène à écrire que notre manque d’ouverture
    aux autres et notre pratique du chacun pour soi nous pousse à pratiquer une
    « culture de murs »(27)

    -« une troisième guerre mondiale par morceaux »
    Toutes ces constatations du renfermement des sociétés et des nations sur elles-
    mêmes sont admirablement résumées dans le paragraphe suivant de l’encyclique :
    Les guerres, les violences, les persécutions pour des raisons raciales ou religieuses,
    et tant d’atteintes à la dignité humaine sont vues de différentes manières selon
    qu’elles conviennent ou non à certains intérêts, fondamentalement économiques. Ce
    qui est vrai quand cela convient à une personne puissante cesse de l’être quand cela
    ne lui profite pas. Ces situations de violence se multiplient « douloureusement en de
    nombreuses régions du monde, au point de prendre les traits de ce qu’on pourrait
    appeler une ‘‘troisième guerre mondiale par morceaux’’(25)
    -Comme on pouvait s’y attendre, la pandémie du Covid 19 est commentée dans le
    texte. C’est une tragédie mondiale qui fait prendre conscience à l’humanité que
    nous constituons une communauté mondiale qui navigue dans le même bateau, où
    le mal de l’un porte préjudice à tout le monde (32).Il nous est rappelé que personne
    ne se sauve tout seul et qu’il n’est possible de se sauver qu’ensemble. Notre
    égocentrisme est battu en retraite et nous voilà obligés de reconnaitre notre
    commune humanité.
    Cette analyse de tous les facteurs et attitudes de repli sur soi qui caractérisent le
    monde actuel, le Pape les résume en un vers écrit par le poète Virgile et qu’on peut
    traduire ainsi : ce monde est un monde de pleurs et les fardeaux de la mort
    blessent les cœurs.
    Les propositions d’ouverture
    Apres toutes ces constatations de manque de fraternité envers autrui, le Pape
    consacre sa Lettre aux attitudes susceptibles de favoriser la promotion de notre
    commune humanité. La parabole du Bon Samaritain occupe une place importante
    dans ses propositions. En effet, il loue cet étranger, honni par ses cousins, les Juifs,
    mais qui s’arrête pour secourir un juif dépouillé par des brigands et abandonné,
    blessé, au bord du chemin. Et ce bon samaritain fera tout son possible pour aider ce
    « frère » dans la tourmente. Une vraie leçon de fraternité, qui enseigne que le
    service à ceux qui sont dans le besoin transcende les considérations de clans, de
    classes, de groupes, de nations….
    En gardant l’enseignement de cette parabole comme ligne de fond, rappelons
    maintenant les propositions du Pape pour que se développe cette fraternité sociale
    qui est le thème central de l’encyclique.
    -Nous sommes invités «  à raviver notre vocation de citoyens de nos pays
    respectifs et du monde entier, bâtisseurs d’un nouveau lien social ». C’est un appel
    toujours nouveau, …. Que la société poursuive la promotion du bien commun et, à
    partir de cet objectif, reconstruise inlassablement son ordonnancement politique et
    social, son réseau de relations, son projet humain. » (66)

    -Evitons le politiquement correct : Regardons finalement l’homme blessé.
    Parfois, nous nous sentons, comme lui, gravement blessés et gisant à terre au bord
    du chemin. Nous nous sentons aussi troublés par nos institutions désarmées et
    démunies, ou mises au service des intérêts d’une minorité, de l’intérieur et de
    l’extérieur. En effet « dans la société globalisée, il y a une manière élégante de
    tourner le regard de l’autre côté qu’on adopte souvent : sous le couvert du
    politiquement correct ou des modes idéologiques, on regarde celui qui souffre sans
    le toucher, on le voit à la télévision en direct, et même on utilise un langage
    apparemment tolérant et plein d’euphémismes »(76)
    Parmi ces personnes blessées, et auxquelles la société doit porter toute son
    attention, se trouvent ce que le Pape désigne du vocable : les « exilés cachés »,
    soit les handicapés, les seniors et les citoyens de second grade.
    -La fraternité doit être vécue. Elle « n’est pas que le résultat des conditions de
    respect des libertés individuelles, ni même d’une certaine équité
    observée. »(103)Elle doit être cultivée consciemment et doit faire l’objet d’une
    volonté politique. La fraternité, ce n’est ni le partenariat en affaires, ni la somme des
    individualismes.
    -Et nous arrivons logiquement à la notion de service. Il ne doit pas être idéologique,
    car il sert des personnes et non des idées. Le service s’exprime par des actes de
    solidarité, dont l’objectif est de «  lutter contre les causes structurelles de la pauvreté, de
    l’inégalité, du manque de travail, de terre et de logement, de la négation des droits sociaux
    et du travail. » (116)
    -A partir de ces considérations, s’enchaine toute une série de propositions allant
    dans le sens de la solidarité et du service :
    (a)…. si quelqu’un a de l’eau en quantité surabondante et malgré cela la préserve
    en pensant à l’humanité, c’est qu’il a atteint un haut niveau moral qui lui permet de
    se transcender lui-même ainsi que son groupe d’appartenance (117)
    (b) Dans la tradition de l’enseignement social de l’Eglise, le Pape rappelle que le
    droit à la propriété privée est secondaire à celui de la fonction sociale de la
    propriété : «  Le droit à la propriété privée ne peut être considéré que comme un
    droit naturel secondaire et dérivé du principe de la destination universelle des biens
    créés ; et cela comporte des conséquences très concrètes qui doivent se refléter sur
    le fonctionnement de la société. »(120)
    (c) L’exercice des droits est « sans frontières » : il est … inacceptable que le lieu de
    naissance ou de résidence implique à lui seul qu’on ait moins de possibilités d’une
    vie digne et de développement (121)
    (d) Le droit de certains à la liberté d’entreprise ou de marché ne peut se trouver au-dessus
    des droits des peuples et de la dignité des pauvres, pas plus qu’au-dessus du respect de
    l’environnement. (122). Mais le Pape tient à préciser que l’activité des entrepreneurs « est
    une vocation noble orientée à produire de la richesse et à améliorer le monde pour tous »
    (123)

    (e) Local et universel : le Pape aborde l’épineuse question du choix entre la globalisation
    et la localisation : « Il faut prêter attention à la dimension globale pour ne pas tomber dans
    une mesquinerie quotidienne. En même temps, il ne faut pas perdre de vue ce qui est local,
    ce qui nous fait marcher les pieds sur terre. L’union des deux empêche de tomber dans l’un
    de ces deux extrêmes : l’un, que les citoyens vivent dans un universalisme abstrait et
    globalisant. […] L’autre, qu’ils se transforment en un musée folklorique d’ermites renfermés,
    condamnés à répéter toujours les mêmes choses, incapables de se laisser interpeller par ce
    qui est différent, d’apprécier la beauté que Dieu répand hors de leurs frontières »(142)

     

    ** Les quatre derniers chapitres , contenant d’autres propositions
    d’ouverture, seront analysés, la semaine prochaine

     

    Nous avons, la semaine dernière, analysé la récente encyclique du Pape
    François, dans laquelle il porte un jugement sévère sur les attitudes
    égocentriques qui caractérisent les relations entre des groupes, entre des
    ethnies, entre des nations. Nous avons aussi commencé à accueillir son
    message d’ouverture sur le monde, cette attitude étant présentée comme devant
    être un antidote aux tentations du repli sur soi. L’essentiel de notre propos dans
    cette suite de l’analyse est de faire connaissance avec les nombreuses pistes
    additionnelles suggérées par le Pape pour assurer et renforcer le dialogue social
    en tous lieux.
    Commençons par une mise en garde :
    Il y a une fausse ouverture à l’universel procédant de la superficialité vide de celui
    qui n’est pas capable de pénétrer à fond les réalités de sa patrie, ou bien de celui qui
    nourrit un ressentiment qu’il n’a pas surmonté envers son peuple.(145) *
    Mais s’il est à l’aise avec ses racines, l’individu sera à même de s’ouvrir de
    manière sincère à l’horizon universel et de se laisser interpeller par ce qui se passe
    ailleurs. Il en est de même pour la rencontre des cultures : »… une culture
    vivante ne copie pas ou ne reçoit pas simplement mais intègre les nouveautés “à sa
    façon”. Cela donne naissance à une nouvelle synthèse qui profite finalement à
    tous… »(146)
    Cette réflexion débouche sur la remarque suivante :
    …la communauté mondiale n’est pas le résultat de la somme des pays
    distincts, mais la communion même qui existe entre eux, l’inclusion mutuelle
    qui est antérieure à l’apparition de tout groupe particulier. C’est pourquoi « chaque
    personne qui naît dans un contexte déterminé sait qu’elle appartient à une famille
    plus grande sans laquelle il est impossible de se comprendre pleinement »(149)
    Les peuples sont interdépendants : la conscience d’avoir des limites ou de n’être
    pas parfait, loin de constituer une menace, devient l’élément-clé pour rêver et
    élaborer un projet commun.(150) .Le Pape se prononce en faveur d’une famille des
    nations caractérisée par l’intégration culturelle, économique et politique (151).C’est
    ainsi que pour les pays petits ou pauvres s’ouvre la possibilité de conclure avec leurs
    voisins des accords régionaux qui leur permettent de négocier en bloc et d’éviter de
    devenir des segments marginaux et dépendants des grandes puissances. Aujourd’hui
    aucun État national isolé n’est en mesure d’assurer le bien commun de sa
    population. (153) Ce réalisme quant aux relations internationales entre Etats, petits
    et grands, pauvres et riches, est susceptible de nous rappeler, à nous, Mauriciens,

    la nécessite de renforcer nos relations régionales avec nos partenaires des
    Iles de l’Océan Indien, ainsi que ceux du COMESA et du SADC.
    Se déroule ensuite le chapitre cinq de l’encyclique, portant sur le développement
    d’une communauté mondiale, capable de réaliser la fraternité à partir des peuples et
    des nations qui vivent l’amitié sociale. Le chapitre est intitulé : La meilleure
    politique, laquelle doit être au service du bien commun, permettant ainsi « le
    développement d’une communauté mondiale, capable de réaliser la fraternité à
    partir des peuples et des nations qui vivent l’amitié sociale. »(154)
    Dans cette optique, le Pape ne se prive pas de commentaires sur des pratiques
    politiques et économiques contemporaines.
     « Le mépris des faibles peut se cacher sous des formes populistes, qui les
    utilisent de façon démagogique à leurs fins, ou sous des formes libérales au
    service des intérêts économiques des puissants. Dans les deux cas, on perçoit
    des difficultés à penser un monde ouvert où il y ait de la place pour tout le
    monde, qui intègre les plus faibles et qui respecte les différentes cultures. »
    (155).Il est reproché aux populistes »d’instrumentaliser politiquement la
    culture du peuple, grâce à quelque symbole idéologique, au service de leur
    projet personnel et de leur maintien au pouvoir. » (159) Quant aux visions
    libérales, elles prônent l’individualisme, considérant la société « comme une
    simple somme d’intérêts qui coexistent. » (163). C’est pourquoi le Pape plaide
    pour une charité qui est « capable d’atteindre un frère ou une sœur éloignés,
    voire ignorés, à travers les différentes ressources que les institutions d’une
    société organisée, libre et créative sont en mesure de créer. (165)
     Il affirme aussi que le combat contre les inégalités et les abus des « 
    pouvoirs économiques, technologiques, politiques ou médiatiques »
    ne sera remporté que grâce au travail d’éducation, au développement des
    habitudes solidaires, à la capacité de penser la vie humaine plus
    intégralement et à la profondeur spirituelle. (167) Sont aussi critiquées les
    théories et pratiques liées à la primauté du marché et à la spéculation
    financière. Quant à croire au «  ruissellement », c’est-à-dire les retombées
    positives de la croissance pour réduire les inégalités socio-économiques, c’est
    une erreur. (168).
     Pour la réussite du développement intégral d’une population, il faut
    que«  soit dépassée cette idée de politiques sociales conçues comme une
    politique vers les pauvres, mais jamais avec les pauvres, jamais des pauvres,
    et encore moins insérée dans un projet réunissant les peuples. »(169)
     Le pouvoir des Etats nationaux s’est affaibli «  parce que la dimension
    économique et financière, de caractère transnational, tend à prédominer sur
    la politique » (172) La Lettre plaide , donc, pour «  la création
    d’organisations mondiales plus efficaces, dotées d’autorité pour
    assurer le bien commun mondial, l’éradication de la faim et de la
    misère ainsi qu’une réelle défense des droits humains

    fondamentaux. »(172) On s’assurera, toutefois, « que cette autorité ne soit
    cooptée par quelques pays  et en même temps », on fera en sorte «  pour
    empêcher des impositions culturelles ou la violation des libertés
    fondamentales des nations les plus faibles à cause de différences
    idéologiques. (173).Sans les nommer, le Pape salue les organisations
    internationales privées qui viennent pallier les faiblesses évoquées : c’est
    pour lui l’heureuse application du fameux principe de subsidiarité toujours mis
    en avant dans la doctrine sociale de l’Eglise.
     Si la pratique de la politique est généralement mal perçue, c’est à cause des
    erreurs, de la corruption, et de l’inefficacité de certains hommes politiques.
    Mais, se demande le Pape, le monde peut-il fonctionner sans la politique ?
    Peut-il y avoir un chemin approprié vers la fraternité universelle et
    la paix sociale sans une bonne politique ? (176) .Rappelons, ici,
    l’affirmation de Paul VI à l’effet que » la politique est une manière exigeante –
    mais non la seule – de vivre l’engagement chrétien au service des autres. »
    (Octogesima Adveniens, 1971)). A condition, bien sûr, de la pratiquer comme un
    service à autrui et non pour promouvoir ses propres intérêts !

    La politique appropriée est celle qui met la promotion du bien commun à long
    terme au premier plan : pas de soumission à l’économie et à la technocratie,
    respect des grands principes de valeurs humaines, attention portée sur une vision à
    long terme, même si elle risque d’être au détriment de succès électoraux dans le
    court terme. Le Pape rappelle son attachement à la civilisation de l’amour, thème
    cher à Paul VI. Cette civilisation se traduit par l’amour social et politique qui
    consiste à «  reconnaître chaque être humain comme un frère ou une
    sœur »(180).Ce n’est pas une utopie pour le Pape, mais cela exige un engagement
    qui peut mener à la sphère politique au service de nos frères et sœurs. D’où le
    recours du Pape au terme inusuel d’amour politique. (180), lequel est contraire à
    toute mentalité individualiste(182).Et c’est ainsi que s’ouvriront les « chemins
    efficaces de développement pour tous »(183).
    Le Pape conclut sa réflexion sur la politique par un paragraphe qui mérite d’être
    largement cité, car il situe bien comment l’action politique, dénuée de toute
    coloration électoraliste, peut être un vrai acte de service du bien commun.
    Il y a un amour …qui consiste dans les actes procédant directement de la vertu de charité
    envers les personnes et les peuples. Il y a également … ces actes de charité qui poussent à
    créer des institutions plus saines, des réglementations plus justes, des structures plus
    solidaires…. C’est de la charité que d’accompagner une personne qui souffre, et c’est
    également charité tout ce qu’on réalise, même sans être directement en contact avec cette
    personne, pour changer les conditions sociales qui sont à la base de sa souffrance. Si
    quelqu’un aide une personne âgée à traverser une rivière, et c’est de la charité exquise, le
    dirigeant politique construit un pont, et c’est aussi de la charité. Si quelqu’un aide les autres
    en leur donnant de la nourriture, l’homme politique crée pour lui un poste de travail et il
    exerce un genre très élevé de charité qui ennoblit son action politique. (186)

    Apres ces considérations sur l’action politique, le Pape revient, dans les chapitres 6
    et 7 de l’encyclique, au dialogue et à l’amitié sociale. Il définit ainsi le
    dialogue : » Se rapprocher, s’exprimer, s’écouter, se regarder, se connaître, essayer de se
    comprendre, chercher des points de contact, tout cela se résume dans le verbe ‘‘dialoguer’’.
    Pour nous rencontrer et nous entraider, nous avons besoin de dialoguer »Et il ajoute : « Le
    dialogue persévérant et courageux ne fait pas la une comme les désaccords et les conflits,
    mais il aide discrètement le monde à mieux vivre, beaucoup plus que nous ne pouvons
    imaginer. (198)
    Et le dialogue est une nécessité pour tous : entre les générations, entre la culture
    populaire, la culture universitaire, la culture des jeunes, la culture artistique et
    technologique, la culture économique et la culture de la famille, et la culture des
    médias……Mais il ne faut pas confondre dialogue et échanges sur les réseaux
    sociaux : On confond en général le dialogue avec quelque chose de très différent : un
    échange fébrile d’opinions sur les réseaux sociaux, très souvent orienté par des informations
    provenant de médias pas toujours fiables. Ce ne sont que des monologues parallèles qui
    s’imposent peut-être à l’attention des autres plutôt en raison de leurs tons élevés et
    agressifs. Mais les monologues n’engagent personne, au point que leurs contenus sont
    souvent opportunistes et contradictoires. (200) .C’est ainsi que le manque de dialogue
    aboutit à la recherche de son bien personnel, au détriment de la recherche du bien
    commun. C’est un dialogue social authentique qui est requis, dans le respect du point de
    vue de l’autre et en acceptant la possibilité qu’il contienne quelque conviction ou intérêt
    légitime.
    Est aussi demandé le dialogue entre les chercheurs des différentes disciplines : On
    ne doit pas éluder le risque qu’une avancée scientifique soit considérée comme l’unique
    approche possible pour saisir tous les aspects de la vie, de la société et du monde. (203)
    Le rôle des medias est abordé : «  En ce monde globalisé, les médias peuvent contribuer à
    nous faire sentir plus proches les uns des autres ; à nous faire percevoir un sens
    renouvelé de l’unité de la famille humaine,…. Mais il est nécessaire de s’assurer
    constamment que les formes de communication actuelles nous orientent effectivement vers
    une rencontre généreuse, vers la recherche sincère de la vérité intégrale, le service
    des pauvres, la proximité avec eux, vers la tâche de construction du bien commun… »(205)
    Le Pape s’étend davantage sur ce qu’est la vérité :… » Ce que nous appelons “vérité”, ce
    n’est pas seulement la diffusion de faits par la presse. … C’est avant tout la recherche des
    fondements les plus solides de nos options ainsi que de nos lois. Cela suppose qu’on
    admette que l’intelligence humaine puisse aller au-delà des convenances du moment et
    saisir certaines vérités qui ne changent pas, qui étaient vraies avant nous et le seront
    toujours. En explorant la nature humaine, la raison découvre des valeurs qui sont
    universelles parce qu’elles en dérivent (208).C’est aussi le moment que saisit le Pape pour
    affirmer que tout être humain possède une dignité inaliénable … indépendamment de
    tout changement culturel (213).
    Une culture nouvelle
    L’encyclique aborde alors un thème cher au Pape François, celui de l’ouverture
    aux périphéries.  « À plusieurs reprises, j’ai invité à développer une culture de la
    rencontre qui aille au-delà des dialectiques qui s’affrontent. C’est un style de vie visant à
    façonner ce polyèdre aux multiples facettes, aux très nombreux côtés, mais formant

    ensemble une unité pleine de nuances…..Le polyèdre représente une société où les
    différences coexistent en se complétant, en s’enrichissant et en s’éclairant réciproquement,
    même si cela implique des discussions et de la méfiance. En effet, on peut apprendre
    quelque chose de chacun, personne n’est inutile, personne n’est superflu. Cela implique que
    les périphéries soient intégrées… (215)
    C’est pourquoi il faut « intégrer les différences », mais cela ne s’obtient pas en mettant
    ensemble uniquement les purs, car « même les personnes qui peuvent être critiquées pour
    leurs erreurs ont quelque chose à apporter qui ne doit pas être perdu « ….Ce qui est bon,
    c’est de créer des processus de rencontre, des processus qui bâtissent un peuple capable
    d’accueillir les différences. Outillons nos enfants des armes du dialogue ! Enseignons-leur le
    bon combat de la rencontre ! (217)
    Et tout cela doit être imprégné de bienveillance :
    … L’individualisme consumériste provoque beaucoup de violations. Les autres sont
    considérés comme de vrais obstacles à une douce tranquillité égoïste (222). Aujourd’hui,
    on n’a ni l’habitude ni assez de temps et d’énergies pour s’arrêter afin de bien
    traiter les autres, de dire “s’il te plait”, “pardon”, “merci”.(224) C’est
    pourquoi il faut recourir à la bienveillance qui libère de «  la cruauté qui
    caractérise parfois les relations humaines, de l’anxiété qui nous empêche de
    penser aux autres, de l’empressement distrait qui ignore que les autres aussi
    ont le droit d’être heureux. »(224)
    La culture nouvelle signifie aussi une attitude de vraie réconciliation lorsque
    des souffrances ont été ressenties et subies, suite à des conflits et des
    guerres. »…..La vraie réconciliation, loin de fuir le conflit, se réalise plutôt dans le conflit,
    en le dépassant par le dialogue et la négociation transparente, sincère et patiente. »(244)
    C’est ainsi qu’on ne doit pas exiger une sorte de “pardon social” de la part de celui qui a
    beaucoup souffert injustement et cruellement. La réconciliation est un fait personnel, et
    personne ne peut l’imposer à l’ensemble d’une société, même si elle doit être promue.
    (246).
    La réconciliation ne peut être générale. Il est impossible d’effacer de la mémoire la
    Shoa, ou les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki, car « on ne progresse
    jamais sans mémoire, on n’évolue pas sans une mémoire complète et lumineuse »
    (249).De même, il est impossible d’ » oublier les persécutions, le trafic d’esclaves et
    les massacres ethniques qui se sont produits, et qui se produisent dans plusieurs
    pays, ainsi que tous les autres faits historiques qui nous font honte d’être des
    hommes».(248)
    Toutefois, ne pas oublier doit être accompagné d’un renoncement à être
    possédé par cette même force destructrice dont on a été victime. Ce qui
    importe, c’est de briser le cercle vicieux, afin de ralentir les progrès des forces de
    destruction. La vengeance ne résout rien. (251)
    C’est ainsi que le Pape, à l’instar de ses récents prédécesseurs, se prononce contre
    la peine de mort : «  il est impossible d’imaginer qu’aujourd’hui les États ne

    puissent pas disposer d’un autre moyen que la peine capitale pour défendre la vie
    d’autres personnes contre un agresseur injuste »(267).
    Le recours à la guerre est aussi décrié. »La guerre est toujours un échec de la
    politique et de l’humanité, une capitulation honteuse, une déroute devant les forces du
    mal….. C’est pourquoi « La Charte des Nations Unies, respectée et appliquée dans la
    transparence et en toute sincérité, est un point de référence obligatoire de justice et une
    voie de paix. Mais cela suppose que des intentions spécieuses ne soient pas masquées et
    que des intérêts particuliers d’un pays ou d’un groupe ne soient pas placés au-dessus du
    bien commun du monde entier. »(257)
    Le Pape complète sa réflexion en proposant la création d’un Fonds mondial en vue
    d’éradiquer une bonne fois pour toutes la faim et pour le développement des pays
    les plus pauvres, de sorte que leurs habitants ne recourent pas à des solutions violentes ou
    trompeuses ni n’aient besoin de quitter leurs pays en quête d’une vie plus digne (262) En
    l’absence de guerres entre les Etats, ceux-ci seraient en mesure de faire des économies sur
    leur budget de défense et ainsi dégager des ressources pour financer le Fonds Mondial.
    Le dernier chapitre de l’encyclique est consacré au rôle des religions au service de
    l’humanité. Le paragraphe suivant met bien en évidence le rôle de l’Eglise par rapport au
    monde politique : »… même si l’Église respecte l’autonomie de la politique, elle ne limite pas
    pour autant sa mission au domaine du privé. Au contraire, « elle ne peut ni ne doit […]
    rester à l’écart dans la construction d’un monde meilleur, ni cesser de réveiller les forces
    spirituelles qui fécondent toute la vie sociale. Les ministres religieux ne doivent certes
    pas faire de la politique partisane, qui revient aux laïcs, mais ils ne peuvent pas non plus
    renoncer à la dimension politique de l’existence qui implique une constante attention au bien
    commun et le souci du développement humain intégral. (276)
    L’occasion est aussi saisie pour réclamer la liberté de pratiquer sa religion, quelle qu’elle
    soit : Nous, chrétiens, nous demandons la liberté dans les pays où nous sommes
    minoritaires, comme nous la favorisons pour ceux qui ne sont pas chrétiens là où ils sont en
    minorité. Il y a un droit fondamental qui ne doit pas être oublié sur le chemin de la fraternité
    et de la paix. C’est la liberté religieuse pour les croyants de toutes les religions. (279) Les
    violences et les actes terroristes envers les religions sont évoqués et condamnées.
    Finalement, en toute simplicité, et comme pour rappeler que son appel à la fraternité
    universelle n’est qu’un parmi d’autres, il cite ceux qui l’ont inspiré, notamment Martin Luther
    King, Desmond Tutu, Mahatma Mohandas Gandhi et beaucoup d’autres encore dont Charles
    de Foucauld qui, grâce à son expérience intense de Dieu, a fait un cheminement de
    transformation jusqu’à se sentir le frère de tous les hommes et femmes. (286)

     

    * Les numéros accompagnant les citations se réfèrent aux paragraphes de
    l’encyclique.

     

     

    03/11/2020 Pierre DINAN